(Don Juan ou Le festin de Pierre , Molière, Acte III, scène 1).
C'est avec cette scène que je donnais en concours de sortie du Conservatoire en 1957, que j'obtins un second prix de Comédie classique qui me valut d'être engagé comme Pensionnaire à la Comédie Française. Du personnage de Sganarelle, demeure en moi un certain bon sens d'où la logique n'est pas exclue. D'autant que cette logique est étayée par des principes inculqués par ma famille. Je me souviens que mon cousin Jean Deflassieux dont j'ai déjà parlé et qui fut PDG du Crédit Lyonnais de 1982 à 1986, me dit un jour : "Il ne faut jamais travailler contre l'intérêt national". J'ajoute : "Et à plus forte raison contre l'intérêt social".
Aussi, quand les délocalisations sont devenues choses courantes, j'ai très vite saisi qu'elles s'avèreraient au fil du temps aussi néfastes que si on bombardait des usines françaises car le chômage endémique allait se repaître des nombreuses victimes mises sur le carreau. On parlait à une certaine époque de la préférence nationale dont le principe a été vite oublié, quant à la préférence européenne, il n'en a jamais été question et aucun gouvernement ni de droite ni de gauche n'a réellement pris la chose au sérieux. C'était trop évident. Pourtant, "avec mon petit sens, mon petit jugement", il me semble clair que n'importe quelle usine française se délocalisant pour faire exécuter certains travaux ailleurs que sur le sol afin que ses produits soient plus compétitifs, devrait bien faire les comptes suivants : pendant que je deviens compétitive, je me vois tenue bien évidemment, de mettre sur le trottoir certains de mes ouvriers ou de mes ouvrières. Au bout du compte, combien coûte à l'Etat ma compétitivité en travaillant contre l'intérêt national et social ? L'Etat ne devrait-il pas se réveiller pour dire : "Cela rapporte quoi à la Nation que vous soyez compétitifs sur le marché ? Elle nous coûte cher votre compétitivité". Et cela est d'autant plus scandaleux quand il s'agit d'usine dans laquelle l'Etat est actionnaire. Cela relève de l'inconscience totale. Qui assume les responsabilités en tant que Ministre du Budget ? Nous sommes aussi ineptes que me semblent l'être les Américains et nous tomberons avec eux.